Il vous est proposé dans cet article, 3 exercices corrigés de droit constitutionnel ivoirien : il s’agit d’un cas pratique, d’une dissertation et enfin d’un commentaire d’article. Ces exercices corrigés de droit constitutionnel vont vous servir de modèle.
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1-CAS PRATIQUE
Une délégation de parlementaires en mission et dirigée par le député MABINTOU, se rend dans la circonscription du Bénin où viennent d’éclater de violents incidents en faveur de l’indépendance de cette partie australe de l’État de SOKOURA. Au cours d’un meeting organisé à cet effet, le député MABINTOU s’attaque ouvertement au gouvernement.
Il le qualifie de barbare, de corrompu, d’incompétent et surtout de malhonnête. Très furieuse, BABYEHON saisi le Parlement aux fins de lever l’immunité parlementaire du député MABINTOU, alors que nous sommes au mois de février.
Pour désamorcer la crise, contre le gré de l’opposition, le Parlement vote une loi interdisant toute manifestation en faveur de l’indépendance.
Sur saisine de la citoyenne MARIETOU, la Cour Constitutionnelle a invité à se prononcer sur la constitutionnalité de la loi interdisant toute manifestation en faveur de l’indépendance. Et, malgré certaines illégalités de la loi, celle-ci est adoptée par voie de référendum à l’initiative du Président de la République.
NB : Les solutions aux problèmes juridiques posées dans ce cas pratique sont les mêmes que celles prévues par la législation ivoirienne.
Correction du cas pratique
Ce cas pratique soulève principalement deux problèmes juridiques. L’un se rapporte à l’irresponsabilité du parlementaire, tandis que l’autre concerne la légalité de la loi interdisant toute manifestation en faveur de l’indépendance.
I- L’IRRESPONSABILITE DE MABINTOU
Quelle est la condition de l’irresponsabilité ou la nature de l’acte pouvant emporter l’irresponsabilité ? En outre, quelles sont les conséquences juridiques qui peuvent résulter de l’irresponsabilité à savoir, la levée de l’immunité parlementaire.
A- La condition de l’irresponsabilité
En principe, le député ivoirien jouit de deux immunités parlementaires dont l’une concerne les actes commis dans l’exercice de ses fonctions (article 91 de la Constitution ivoirienne), tandis que l’autre est relative à l’inviolabilité, en ce qui concerne les actes commis par le député en tant que citoyen, c’est-à-dire des actes sans corrélation aucune avec l’exercice de ses fonctions (article 92 de la Constitution ivoirienne).
En effet, l’irresponsabilité vise les opinions de votes émis par le parlementaire dans l’exercice de ses fonctions. Entendu stricto sensu, il s’agit des opinions ou votes dans l’enceinte de l’institution parlementaire. Sont donc exclus les opinions exprimées en dehors du parlement.
Toutefois, l’exercice des fonctions peut se prolonger exceptionnellement au-delà du parlement et faire jouer la théorie de l’irresponsabilité parlementaire. C’est le cas du parlementaire envoyé en mission parlementaire. C’est le prolongement du parlement au-delà de l’hémicycle.
Dans le cas pratique, MABINTOU dirige une mission parlementaire, laquelle se rend dans la circonscription du BENIN où viennent d’éclater de violents incidents en faveur de l’indépendance. Il peut s’agir d’une commission d’enquête parlementaire ou de réconciliation. Ce faisant, on peut considérer que MABINTOU est dans l’exercice de ses fonctions. L’opinion émise par elle relève donc de l’irresponsabilité et non de l’inviolabilité. Puisqu’il s’agit de l’irresponsabilité, est-il nécessaire de lever l’immunité parlementaire de MABINTOU ?
B- L’inutilité de la levée de l’immunité parlementaire
La levée de l’immunité parlementaire ne peut jouer que dans l’unique cas de l’inviolabilité. Dès lors, la requête de BABYEHON est inopportune, superfétatoire, donc irrecevable. Il n’est point nécessaire d’accorder une importance quelconque à la période des sessions parlementaires.
Ces précisions ainsi faites, nous pouvons à présent nous intéresser à la question de la légalité de la loi interdisant toute manifestation en faveur de l’indépendance.
II- LA LEGALITE DE LA LOI INTERDISANT TOUTE MANIFESTATION EN FAVEUR DE L’INDEPENDANCE
On s’intéressera d’une part à la saisine de la Cour Constitutionnelle par MARIETOU et d’autre part à l’organisation du référendum.
A- La saisine de la Cour Constitutionnelle par MARIETOU
Dans le contrôle de la constitutionnalité des lois de type juridictionnel, on a la saisine par voie d’action et la saisine par voie d’exception. En dehors de tout procès, il ne peut s’agir que du contrôle par voie d’action et non par voie d’exception. Par ailleurs, le contrôle par voie d’action comporte deux modalités à savoir : le contrôle ouvert aux citoyens et le contrôle strictement limité aux personnalités politiques. La compétence de MARIETOU est liée au type de contrôle en vigueur dans l’État de SOKOURA.
À la lumière de la législation ivoirienne, la saisine du Conseil constitutionnel n’est pas ouverte au citoyen mais limitée aux autorités politiques Puisque c’est la même législation qui est en vigueur dans l’État de SOKOURA, la requête de MARIETOU serait irrecevable pour incompétence. Certainement pour contourner les illégalités de la loi, le Chef de l’État de SOKOURA soumet le texte à référendum.
B- L’organisation du référendum
Ce référendum pose deux problèmes juridiques : l’initiative du référendum et les effets juridiques de ce référendum.
1- L’initiative du chef de l’État
Qu’il s’agisse de l’Article 103 ou 25 al. 2 de la Constitution ivoirienne, l’initiative du référendum appartient uniquement au Président de la République. Dans la mesure où ce referendum ne concerne aucune révision constitutionnelle le Président de la République peut saisir directement le peuple par voie, de référendum. C’est le recours à l’Article 75 de la Constitution ivoirienne. Malgré l’affirmation de la compétence du Président de la République, quelle peut être la conséquence juridique d’un texte soumis à référendum alors que celui-ci comporte des illégalités ?
2- Les effets juridiques du référendum
Dans un État de type démocratique, le peuple se situe en amont et en aval de tout pouvoir. Dans la mesure où il a la compétence de sa compétence, son intervention par voie de référendum purge tout texte de ses inégalités, congénitales précédemment signalées.
La loi interdisant toute manifestation en faveur de l’indépendance est légale.
En attendant tout autre acte contraire du peuple, elle jouit d’une légalité absolue que ne saurait censurer la Cour Constitutionnelle.
2- Dissertation
SUJET : Opposition ou complémentarité des fonctions de l’État ?
Correction du sujet : Opposition ou complémentarité des fonctions de l’État ?
INTRODUCTION
L’État exerce une double fonction. Une fonction politique et une fonction juridique. Alors que la première fonction s’appréhende au plan de la finalité de l’État, la seconde se situe quant à elle au plan des moyens au service de la finalité poursuivie par l’État. On relève au plan de la fonction politique une opposition quant à la finalité de l’État (I). Mais, quel que soit l’option adoptée, la fonction juridique apparaît comme complémentaire de la fonction politique (II).
I- L’OPPOSITION CONCEPTUELLE QUANT À LA FONCTION POLITIQUE DE L’ETAT
A- La conception libérale ou l’État au service du “BIEN COMMUN”
Selon St THOMAS D’ACQUIN “les Etats doivent rechercher le bien commun”. Autrement dit, l’État est censé poursuivre l’intérêt général. Dans cette quête, le rôle joué par l’État a connu une évolution notable : de l’État simple spectateur du jeu social (1), on est passé aujourd’hui à l’État acteur principal de ce même jeu social (2).
1- L’État spectateur ou l’État gendarme ou arbitre
Ces trois qualificatifs ont été appliqués à l’État jusqu’à la Première Guerre mondiale, et même jusqu’au crash boursier de 1929. Ces différents qualificatifs évoquent une situation dans laquelle l’État est cantonné dans les fonctions strictes de défense de la communauté à l’égard des agressions d’origine extérieure ainsi que de police à l’intérieur de la communauté considérée.
Une telle conception du rôle de l’État, essentiellement amorphe, négative, était en fait liée d’une part à la doctrine économique capitaliste du “laissez faire, laissez aller”, laquelle était créditée d’immenses mérites par les économistes d’alors.
D’autre part, les citoyens qui venaient de triompher et d’acquérir vers la fin du XVIIIe siècle des libertés individuelles au prix de maintes révolutions sanglantes dirigées contre toute-puissance de l’État monarchique, avaient le souci de les préserver dorénavant non seulement en les proclamant, mais surtout en prévenant toute intervention malveillante d’un pouvoir autoritaire qui remettait en cause l’acquis révolutionnaire.
Le principe a été posé dès lors de l’interdiction faite à l’État d’intervenir dans le jeu des forces sociales et économiques. Il convient toutefois de corriger légèrement cette présentation par des personnes privée (assistance politique, institution publique, etc.). Cette intervention négligeable, timide au départ, va s’accroître avec le temps et l’on va assister à un glissement de l’État spectateur vers l’État acteur du jeu social.
2- L’État acteur ou l’État interventionniste ou providence
Au départ de cette évolution, de cette mutation profonde dans la conception du rôle de l’État, on trouve les citoyens eux-mêmes, notamment les couches sociales défavorisées qui sollicitent, exigent l’intervention salvatrice de l’État. L’État ne doit plus se contenter d’assister en spectateur neutre au jeu social.
Il doit désormais s’impliquer directement dans le déroulement du jeu social, afin d’apporter un ” mieux-être, un changement qualitatif ” dans la vie des citoyens.
Outre ces fonctions traditionnelles de gendarme qui demeurent, l’État est investi de missions sociales, économiques ; garant de l’emploi, de la formation professionnelle, de la législation sociale, de la distribution de ressources à des catégories défavorisées, de la santé publique, de l’enseignement, de direction de la vie économique, etc.
L’origine de cette conception peut être située dans la prise de conscience après le crash boursier de 1929, des dangers potentiels d’un libéralisme échevelé, essentiellement nocif.
Aujourd’hui, cette conception qui implique de la part de l’État un comportement positif, dynamique en est à considérer que l’État a une fonction “développementiste“. L’État a pour objet et pour devoir d’assurer un développement économique et social harmonieux. On voit l’État dans cette perspective de maîtrise de toutes les activités nationales afin de les canaliser vers l’objectif de développement, mettre en place une politique de planification économique.
Mais le revers de cet interventionnisme croissant de l’État est que l’individu, le citoyen, assiste à un envahissement par l’État de toute la sphère sociale. Il perd ainsi en autonomie ce qu’il gagne en mieux-être et en sécurité. Il s’ensuit de nos jours la revendication d’une déréglementation.
B- La conception marxiste ou l’État au service d’une classe sociale
Selon cette conception, l’État, contrairement à la vision libérale, ne cherche pas le bien-être général. Il cherche plutôt le bien d’une classe sociale donnée, dont il n’est que l’instrument. Dans l’État capitaliste, l’État est un instrument au service des intérêts de la bourgeoisie.
L’État est essentiellement un appareil d’oppression, utilisé par la bourgeoisie pour asseoir sa domination sur les classes exploitées (notamment la classe ouvrière). Pourtant en U.R.S.S., malgré la proclamation officielle par le 22e congrès du P.C.U.S. en 1961, de la fin de la dictature du prolétariat, l’État n’a pas disparu ; bien au contraire, il s’est renforcé.
Il a été soutenu qu’il est désormais “l’État du peuple tout entier” du fait de la réalisation de l’homogénéité sociale. Cet État a donc une autre mission, celle d’assurer le passage du socialisme au communisme. Il a été soutenu qu’il est désormais “l’État du peuple tout entier” du fait de la réalisation de l’homogénéité sociale.
II- LA COMPLEMENTARITE AU PLAN DE LA FONCTION JURIDIQUE
Elle procède traditionnellement par une triple distinction, des fonctions juridiques de l’État. Mais une telle analyse doit être corrigée et précisée eu égard à la pratique.
A- Les fonctions juridiques de l’État
On distingue en théorie la fonction législative, exécutive et judiciaire.
– La fonction législative
Elle consiste pour l’État à formuler des règles de droit de portée générale et impersonnelle notamment les lois du Parlement. Elle est donc le fait de l’organe législatif, c’est-à-dire du parlement. Il faut y ajouter cependant, si l’on s’en tient à la notion matérielle de loi (portée générale et impersonnelle), les décrets réglementaires du gouvernement et certains organes de direction issus de corps d’État qui édictent des ordonnances législatives.
– La fonction exécutive
Elle consiste à assurer l’application (par des mesures individuelles) des règles générales et impersonnelles formulées par le législateur. Cette fonction relève de l’organe exécutif, c’est-à-dire du gouvernement.
– La fonction juridictionnelle
Elle consiste à résoudre les conflits nés de l’application de la loi entre particuliers, entre particuliers et personnes publiques ou entre personnes publiques. Elle est le fait de l’organe judiciaire (tribunaux) qui procède par de mesures individuelles.
Les décisions du juge ont l’autorité de la chose jugée”, c’est-à-dire qu’elles sont définitives, obligatoires et exécutoires (utilisation au besoin de la force publique).
Sauf pour la fonction juridictionnelle, la distinction classique se présente dans la pratique sous un autre schéma. Sur plusieurs points, l’analyse traditionnelle doit être revue et nuancée.
B- Correction de la distinction classique
– Concernant l’organe et la fonction législative
Tous les actes de ces organes ne sont pas nécessairement des lois, c’est-à-dire des règles générales et impersonnelles.
Il pose également des actes individuels. Exemple : distinction honorifique d’un individu, ou bien d’un contrat d’aménagement des bureaux du Parlement.
En outre, l’organe législatif ne remplit pas seul la fonction législative. L’organe exécutif aussi y participe (initiative de loi, projet de loi, domaine réservé au règlement). Enfin, l’organe législatif joue un rôle important de contrôle de l’activité gouvernementale (critique, vote du budget, responsabilité ministérielle dans certains régimes). Il est donc plus indiqué de parler de fonction parlementaire.
– Concernant l’organe et la fonction exécutive
Tous les actes de cet organe n’ont pas forcément une portée individuelle.
Il peut aussi prendre des actes de portée générale et impersonnelle : domaine réglementaire réservé (loi au sens matériel). Exemple : organisation administrative.
En outre, l’exécutif ne se contente pas d’exécuter les lois. Non seulement, il participe à la fonction législative, mais aussi et surtout, il a un rôle d’impulsion de la vie politique et économique qui lui confère un pouvoir énorme de décision et une place prépondérante.
Alors qu’au départ (révolution française de 1789) on cherchait à rabaisser la fonction exécutive à un rôle subalterne, aujourd’hui, on assiste à un véritable renversement de la situation.
Ce sont les parlements qui sont dessaisis de leurs fonctions et ramenés à jouer les seconds rôles. De sorte qu’au lieu de parler de fonction exécutive, il apparaît plus indiqué aujourd’hui de parler de fonction gouvernementale.
Sujet : Commentaire combiné des articles 61 et 84 de la Constitution ivoirienne.
Correction du sujet : Commentaire combiné des articles 61 et 84 de la Constitution ivoirienne.
Énoncé des Articles 61 et 84 combinés de la Constitution ivoirienne de 2016 :
Article 61
« Les fonctions de Président de la République sont incompatibles avec l’exercice de tout mandat parlementaire, de tout emploi public et de toute activité professionnelle. »
Et Article 84
« Les fonctions de membre du Gouvernement sont incompatibles avec l’exercice de tout emploi public et de toute activité professionnelle. Le parlementaire nommé membre du Gouvernement ne peut siéger au Parlement pendant la durée de ses fonctions ministérielles. Les dispositions de l’article 60 alinéas 2 et 3 s’appliquent aux membres du Gouvernement pendant la durée de leurs fonctions. »
INTRODUCTION
– Situer les articles 61 et 84 de la Constitution dans le système politique établi par la Côte d’Ivoire.
– Mais, noter que son contenu va au-delà du régime présidentiel choisi par la Côte d’Ivoire, d’autant que les incompatibilités qu’il prévoit transcendent le niveau du régime politique choisi.
– Énoncer les deux axes qu’offre la lecture des articles 61 et 84 de la Constitution. Ce sont :
- L’affirmation des incompatibilités touchant le pouvoir exécutif.
- Le régime des incompatibilités.
I- L’AFFIRMATION DES INCOMPATIBILITES TOUCHANT LE POUVOIR EXECUTIF
A- Le principe des incompatibilités
1- L’affirmation tranchée du principe (voir l’usage de l’indicatif qui vaut impératif)
2- Les incompatibilités touchant le Président de la République autant que les membres du gouvernement
B- L’étendue des incompatibilités
1- Les incompatibilités tenant au régime politique : l’incompatibilité avec le mandat parlementaire
2- Les incompatibilités tenant à la mission du pouvoir exécutif : incompatibilité avec tout emploi public, incompatibilité avec toute activité professionnelle.
II- L’ORIGINE DES INCOMPATIBILITES
A- Des incompatibilités absolues
1- Leur domaine d’application personnel
2- Leur domaine d’application matériel
B- Une incompatibilité relative
1- Elle ne concerne pas le statut
2- Elle n’affecte pas la fonction
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