Dans cet article, il vous est présenté trois exercices corrigés de droit civil – Licence 2 (droit des obligations). Il s’agit d’une dissertation juridique et de deux cas pratiques entièrement corrigés.
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1- Dissertation juridique
Sujet : Interpréter l’article 1321 du Code Civil : « Les contre-lettres… n’ont point d’effet contre les tiers ».
Correction de la dissertation
Introduction
Définition de la contre-lettre : la contre-lettre est une forme de simulation. En quoi elle consiste ?
Elle consiste à dissimuler le contrat véritable derrière un acte apparent.
– Les règles de droit commun relatives à l’effet des contrats : un contrat n’a pas d’effet à l’égard des tiers (Art 1165 C.Civ). L’art 1321 C.Civ n’est-il donc qu’une application de droit commun ?
– Distinction entre l’effet et l’opposabilité du contrat : un contrat n’a pas, en principe d’effet à l’égard des tiers, mais il leur est opposable.
– La situation des ayants cause particuliers : dans des cas exceptionnels, le contrat produit effet à leur égard.
La contre-lettre n’est pas opposable aux tiers et elle est toujours sans effet à l’égard des ayants cause particuliers.
I- Le sens du mot « tiers »
Le mot « tiers » dans l’article 1321 C.Civ désigne les ayants cause particuliers, les créanciers chirographaires.
Un contrat, lorsqu’il constitue une contre-lettre n’a donc en principe d’effet qu’à l’égard des parties contractantes et de leur ayant cause universel et à titre universel (sauf nullité édictée dans certains cas par le législateur), et il n’est opposable à aucun autre.
Des ayants cause particuliers et les créanciers chirographaires ont le droit d’ignorer la contre-lettre et de s’en tenir à l’acte apparent. Mais il faut qu’ils n’aient pas eu connaissance de la contre-lettre quand ils ont traité, sinon il n’y aurait pas apparence. Or, les règles de la contre-lettre sont une consécration de la théorie de l’apparence.
II- Le sens de l’expression « contre les tiers »
La raison pour laquelle la contre-lettre n’a jamais d’effet à l’égard des ayants cause particuliers, et pour laquelle elle est inopposable aux ayants cause particuliers et aux créanciers chirographaires est que, si la simulation est en principe permise, elle ne doit pas causer de préjudices aux tiers.
Ceux-ci doivent être protégés. Mais une mesure de protection ne doit pas se retourner contre eux. Ils ont donc le choix entre l’opposabilité de l’acte réel (contre-lettre) selon le droit commun, et l’opposabilité de l’acte apparent par exception au droit commun. Tel est le sens de l’expression « contre les tiers ». La contre-lettre ne peut pas être invoquée contre les tiers, mais ils peuvent s’en prévaloir.
En cas de conflit entre les tiers qui ont intérêt à invoquer la contre-lettre et ceux qui ont intérêt à se prévaloir de l’acte apparent, ces derniers (acte apparent) l’emportent par application de la théorie de l’apparence.
2- Deux (2) cas pratiques
Cas pratique N°1
N’DOUBA âgé maintenant de 16 ans a acquis d’un héritage à lui léguer par son grand-père, un magasin de pagnes et une villa. Il les met en location, le magasin pour un loyer mensuel de 150 000 F CFA et de 300 000 F CFA pour la villa.
À la suite de difficultés de paiement du loyer par le locataire de la villa, il la vend à 50 000 000 F CFA.
À son père, M Bogoss mécontent veut annuler les actes effectués par son fils. Il vient solliciter votre avis.
Correction du premier cas pratique
N’DOUBA, mineur âgé de 16 ans a mis en location à 150 000 F CFA, un magasin de pagnes et vendu à 50 000 000 F CFA, une villa acquise d’un héritage à lui léguer par son grand-père. Son père mécontent veut annuler ces actes.
Il se pose alors le problème juridique suivant : Un père peut-il annuler les actes accomplis par son fils mineur ?
La solution à cette question appelle un principe (I) et des exceptions (II).
I- Le principe de l’incapacité générale du mineur non émancipé
Le fondement de ce principe et son application à N’DOUBA
A- N’DOUBA est-il émancipé ?
L’article 27 de la loi relative à la minorité pose le principe général de l’incapacité d’exercice du mineur non émancipé en ces termes : « Le mineur non émancipé est incapable de contracter ».
Le mineur est dit émancipé lorsqu’il a atteint l’âge de 16 ans et a fait l’objet d’une émancipation par décision de justice.
En l’espèce, N’DOUBA est un mineur de 16 an. Les faits ne précisent pas qu’il a fait l’objet d’une émancipation de la part du juge. N’DOUBA est donc un mineur non émancipé.
B- Le régime des actes accomplis par N’DOUBA
Il ne peut donc contracter. Les actes qu’il a accomplis (vente, location), sont en principe nuls. Mais ce principe admet des exceptions.
II- Les exceptions au principe de l’incapacité générale d’exercice du mineur non émancipé
Le mineur peut accomplir les actes que le représentant légal peut faire seul notamment : les actes de la vie courante, les actes d’administration et les actes conservatoires, à l’exclusion des actes de disposition.
Les actes de la vie courante sont les menus achats que peut effectuer un mineur non émancipé.
Les actes d’administration sont les actes de gestion courante d’un patrimoine (actes qui ne modifient pas substantiellement la consistance d’un patrimoine).
Les actes conservatoires sont les actes qui conservent, des actes ayant pour objet d’éviter au patrimoine une perte. Les actes de disposition sont les actes d’aliénation qui modifient substantiellement la consistance du patrimoine.
À quelle catégorie correspondent les actes passés par le mineur N’DOUBA ?
1- La location du magasin
La location du magasin fait entrer de l’argent dans le patrimoine du mineur. Il s’agit donc d’un acte de gestion de patrimoine, précisément un acte d’administration que le représentant légal peut faire seul.
Le mineur peut donc lui aussi l’accomplir seul. La location du magasin effectuée par le mineur est valable, et son père ne peut donc la faire annuler.
Cependant, la location peut être annulée pour cause de lésion. En effet, l’article 33 alinéa 2 de la loi sur la minorité, dispose que l’acte accompli par le mineur non émancipé est rescindable en faveur du mineur pour cause de lésion quelle qu’en soit l’importance.
En l’espèce, aucun élément des faits ne permet de soutenir une telle hypothèse. Le loyer de la location nous encourage plutôt à l’écarter. Le père ne peut donc faire annuler la location du magasin.
2- La vente de la villa
La vente fait sortir la villa du patrimoine du mineur. Il s’agit d’un acte qui modifie la substance du patrimoine du mineur, donc un acte de disposition que le représentant légal ne peut conclure seul.
Le mineur ne peut également le conclure seul. Il a besoin de l’assistance de son représentant légal.
La vente conclue par le mineur seul est donc nulle. Le sieur Bogoss peut donc obtenir en justice, l’annulation de la vente effectuée par son fils mineur sans son assistance.
Cas pratique N° 2
La Société « Tombaz », ayant son siège central à Paris, 65, avenue des Champs-Elysées, prend contact avec le sieur Cluron demeurant à Lyon, 10, rue de la Fonderie. Elle a l’intention de lui confier un poste de représentant de commerce dans le secteur du Sud-Est.
Des échanges de lettres ont lieu entre la société pollicitante et M. Cluron, bénéficiaire de l’offre.
Le 16 décembre 2011, M. Cluron écrit à la société « Tombaz » qu’il est d’accord sur les propositions faites et qu’il accepte, en conséquence, le poste de représentant.
Le 18 février 2012, la société « Tombaz » décide de rompre le contrat de représentation qui l’unit à M. Cluron.
Ce dernier riposte en traduisant la société devant le Conseil des “prud’hommes” de Lyon. La société « Tombaz » soulève alors l’incompétence de ce tribunal en prétendant que le Conseil des “prud’hommes” compétent est celui de Paris, et non celui de Lyon.
Qu’en pensez-vous ? À votre avis, quel est le tribunal compétent ?
Correction du second cas pratique
La question qui est posée est en relation avec celle du moment de la formation du contrat.
Autrement dit, il s’agit de savoir à quel moment et en quel lieu le contrat de représentation peut être considéré comme ayant été formé entre la société « Tombaz » et M. Cluron.
Est-ce le moment où M. Cluron a donné son acceptation ou est-ce celui où cette acceptation est parvenue entre les mains de la société « Tombaz » ?
Quelle théorie doit-on appliquer ?
Celle de l’émission ou celle de la réception ?
Solution : La Cour de Cassation a pris position dans plusieurs arrêts, concernant la question précise qui nous est posée, en faveur de la théorie de l’émission.
Ainsi, le contrat est formé à la date et au lieu de l’expédition par l’acceptant, de sa lettre d’acceptation. (On prend en compte simplement la date à laquelle la lettre d’acceptation a été postée par l’acceptant).
Date : date d’expédition par M. Cluron de son acceptation : Le 16 décembre 2011
Tribunal compétent : Lieu d’expédition de la lettre d’acceptation : Lyon.
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1 Comments
Kouadio Famissié Boris
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